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Grippe aviaire - T?moignages
? TRAVERS LES MAILLES DU FILET
Par Chahinaz Gheith (Al- Haram Hebdo, Section Soci?t?)
Semaine du 14 au 20 juin 2006, num?ro 614
Apr?s deux mois de lutte, 8 des 15 personnes atteintes du virus H5N1 en Egypte ont surv?cu ? la maladie et sont aujourd?hui compl?tement gu?ries.
Il y a deux mois, personne ne le connaissait. Aujourd?hui, il est devenu un h?ros et son domicile visit? comme un mus?e. A N?qbas, dans le gouvernorat de Qalioubiya, situ? ? 80 km au nord du Caire, Mohamad Abdel-Moneim, 30 ans, dipl?m? technique a ?t? la deuxi?me personne en Egypte ? avoir contract? le virus de la grippe aviaire et s?en est sorti. Chose surprenante, d?s que l?on p?n?tre le petit bourg, les habitants s?affairent pour indiquer son domicile depuis que sa gu?rison a d?fray? la chronique.
Au seuil de sa modeste maisonnette, sa m?re nous accueille chaleureusement et commence ? relater les faits dans les moindres d?tails. ?Mohamad est l?a?n? de mes 4 enfants, il s?occupait avec ses fr?res de notre ferme. Quelques jours apr?s l?apparition de la grippe aviaire, les oiseaux des fermes voisines ont ?t? infect?s par le virus et l??pid?mie s?est ?tendue ? notre basse-cour et nos poules ont commenc? ? mourir?, explique Oum Mohamad. Et d?ajouter: ?Puis, c?est tout notre ?levage qui a ?t? atteint. Et c?est Mohamad qui avait eu la p?nible t?che de ramasser les volailles mortes et de les mettre dans des sacs-poubelles. Le fait de voir toutes les ?conomies de la famille partir en l?air l?a beaucoup afflig?. Il s?est comport? comme un hyst?rique cherchant ? ramasser les poules vivantes pour les isoler des autres?.
A la fin de la journ?e, Mohamad est rentr? chez lui fatigu?. Comme il souffrait d?j? d?une l?g?re grippe, il pensait que cela pouvait en ?tre la cause. Il s?est rendu chez le pharmacien pour se faire une injection, esp?rant se sentir mieux. Mais pris ensuite par une forte fi?vre, il passa une nuit blanche. Le lendemain, il d?cide d?aller ? l?h?pital et le m?decin qui l?a auscult? lui fait faire une prise de sang qu?il envoie dans un laboratoire au Caire. Sans dire ? Mohamad ce qu?il redoutait, il le garda en observation dans son service. Car il est prouv? que les personnes gripp?es courent plus de risques d?attraper le virus H5N1. Le soir, lorsque sa m?re va lui rendre visite, elle le trouve dans un service diff?rent de celui dans lequel il a ?t? admis. ?Mon c?ur a failli s?arr?ter de battre, je pensais qu?il ?tait arriv? un malheur ? mon fils. Mais le m?decin est venu me rassurer. Il m?a expliqu? que Mohamad a ?t? mis en quarantaine sans pour autant m?en expliquer la raison?, poursuit la m?re qui dit avoir appris la nouvelle de sa maladie par les m?dias. Le lendemain, la m?re fut assaillie par une foule de gens et de journalistes. ?Les questions des journalistes et les rumeurs qui circulaient disant que mon fils ?tait mort me gla?aient de frayeur. ? chaque fois que je me rendais ? l?h?pital pour m?assurer qu?il allait bien, ? mon retour ? la maison, j?entendais dire qu?il ?tait mort?, raconte la m?re encore sous le choc tout en ajoutant que le jour o? il est sorti de l?h?pital, elle a sacrifi? un veau et distribu? sa viande ? tous les habitants du village pour remercier Dieu d?avoir sauv? son fils.
Soudain, Mohamad fait irruption dans le salon, avec son corps ch?tif et son sourire timide. Il vient tout juste de terminer son service de chauffeur de microbus. Un travail qu?il exerce depuis que la ferme de ses parents a ?t? d?truite. ?Je me porte ? merveille et ne suis plus aucun traitement?, lance-t-il. Mohamad nous relate l?histoire de l?inconnu qui souhaitait rencontrer celui qui a attrap? cette maladie rare. ?Ignorant que j??tais juste derri?re lui, il a recul? d?s que je me suis avanc? vers lui en mettant sa main sur son nez et sa bouche pour ?viter d??tre contamin?, puis il a fil? comme une fl?che!?. En fait, Mohamad n?a appris le nom de sa maladie que lorsque le ministre de la Sant? lui a rendu visite pour s?enqu?rir de sa sant?. ?C?est lui qui m?a dit que j??tais atteint du virus de la grippe aviaire. A ce moment, je m?en suis remis ? Dieu et me suis dit que si un malheur devait m?arriver, alors il arriverait car tel est mon destin?, poursuit-il. Tout le temps qu?a dur? son hospitalisation, Mohamad n?a fait que prier et lire le Coran. Il dit qu?il n?a pas eu peur de la mort et qu?il y avait d?j? ?chapp? ? l??ge de 10 ans apr?s avoir attrap? une forte fi?vre le laissant paralys? durant un mois.
10 % de chances de survie
Autre victime. Cha?maa Kha?ri habite le village de Minyet Kaline, dans le gouvernorat de Kafr Al-Cheikh (Delta). Elle est rest?e sous respiration artificielle pendant 11 jours. Ses chances de survie n??taient que de 10 %. Cette jeune fille de 18 ans s?occupait uniquement d?un ?levage d?oiseaux. ? Prise d?un malaise, je fus transport?e ? l?h?pital des maladies contagieuses ? Abbassiya, au Caire. On ne m?a pas dit de quoi je souffrais mais d?apr?s le regard et les pr?cautions que prenait le personnel m?dical, j?ai r?alis? que c??tait assez s?rieux. Je ne me suis rendu compte de la gravit? de la maladie que lorsque j?ai appris la nouvelle du d?c?s de la femme de 30 ans originaire du village de Nawa et qui poss?dait une basse-cour ?, explique Cha?maa. Trente-cinq jours d?hospitalisation et de lutte contre la mort, un v?ritable cauchemar pour cette jeune fille et son entourage qui ne s?attendait pas ? ce que cette maladie soit vaincue. Un jour, le p?re a demand? ? la m?re de l?accompagner pour rendre visite ? Cha?maa. La maman est rest?e p?trifi?e. ?Je pensais qu?il m?emmenait la voir pour la derni?re fois. Mais Dieu est mis?ricordieux, il n?a pas voulu me priver de ma fille?. Apr?s deux mois d?hospitalisation, Cha?maa a ?t? accueillie avec des youyous. Elle qui avait quitt? les siens sur une civi?re revenait chez elle en marchant.
De Kafr Al-Cheikh ? Tanta, et plus pr?cis?ment dans le bourg de Birma, Mohamad Ghobachi, un ?tudiant de 17 ans, a lui aussi attrap? la maladie alors qu?il essayait de soigner quelques-unes de ses poules contamin?es par la grippe aviaire. ?On perdait 1 000 volailles par jour. En trois jours, 6 000 ont p?ri. Le spectacle ?tait d?solant, mais j?ai fait tout mon possible pour les soigner en mettant dans ma bouche le m?dicament prescrit par le v?t?rinaire que je pla?ais dans le bec de mes poules?, explique-t-il. C?est ainsi que Ghobachi a ?t? contamin?. ?Si Dieu veut me donner longue vie, on peut m?me me jeter dans la mer, il ne m?arrivera rien?, nous dit-il. Lorsque les voisins ont appris la nouvelle de ma maladie et m?me par la suite lorsque je suis sorti de l?h?pital, ils n?osaient pas s?approcher de moi, comme si j??tais un l?preux. Il y en avait m?me qui changeaient de trottoir. Quant ? mes coll?gues, ils m?ont surnomm? Mohamad richa (plume) et m?me Mohamad influenza (grippe) depuis que j?ai vaincu la maladie.
En tout, 100 provinces et hameaux dans 12 gouvernorats d?Egypte ont ?t? contamin?s par la grippe aviaire. Et m?me si le danger est pass?, la prudence reste de mise car l??pizootie peut reprendre et la maladie retransmise aux habitants. S?il est ?tabli que le virus peut aussi se transmettre d?homme ? homme, comme cela a ?t? bri?vement ?voqu?, la proportion de survivants pourrait alors ?tre bien inf?rieure.
Source: http://hebdo.ahram.org.eg/arab/ahram...6/14/soci2.htm
? TRAVERS LES MAILLES DU FILET
Par Chahinaz Gheith (Al- Haram Hebdo, Section Soci?t?)
Semaine du 14 au 20 juin 2006, num?ro 614
Apr?s deux mois de lutte, 8 des 15 personnes atteintes du virus H5N1 en Egypte ont surv?cu ? la maladie et sont aujourd?hui compl?tement gu?ries.
Il y a deux mois, personne ne le connaissait. Aujourd?hui, il est devenu un h?ros et son domicile visit? comme un mus?e. A N?qbas, dans le gouvernorat de Qalioubiya, situ? ? 80 km au nord du Caire, Mohamad Abdel-Moneim, 30 ans, dipl?m? technique a ?t? la deuxi?me personne en Egypte ? avoir contract? le virus de la grippe aviaire et s?en est sorti. Chose surprenante, d?s que l?on p?n?tre le petit bourg, les habitants s?affairent pour indiquer son domicile depuis que sa gu?rison a d?fray? la chronique.
Au seuil de sa modeste maisonnette, sa m?re nous accueille chaleureusement et commence ? relater les faits dans les moindres d?tails. ?Mohamad est l?a?n? de mes 4 enfants, il s?occupait avec ses fr?res de notre ferme. Quelques jours apr?s l?apparition de la grippe aviaire, les oiseaux des fermes voisines ont ?t? infect?s par le virus et l??pid?mie s?est ?tendue ? notre basse-cour et nos poules ont commenc? ? mourir?, explique Oum Mohamad. Et d?ajouter: ?Puis, c?est tout notre ?levage qui a ?t? atteint. Et c?est Mohamad qui avait eu la p?nible t?che de ramasser les volailles mortes et de les mettre dans des sacs-poubelles. Le fait de voir toutes les ?conomies de la famille partir en l?air l?a beaucoup afflig?. Il s?est comport? comme un hyst?rique cherchant ? ramasser les poules vivantes pour les isoler des autres?.
A la fin de la journ?e, Mohamad est rentr? chez lui fatigu?. Comme il souffrait d?j? d?une l?g?re grippe, il pensait que cela pouvait en ?tre la cause. Il s?est rendu chez le pharmacien pour se faire une injection, esp?rant se sentir mieux. Mais pris ensuite par une forte fi?vre, il passa une nuit blanche. Le lendemain, il d?cide d?aller ? l?h?pital et le m?decin qui l?a auscult? lui fait faire une prise de sang qu?il envoie dans un laboratoire au Caire. Sans dire ? Mohamad ce qu?il redoutait, il le garda en observation dans son service. Car il est prouv? que les personnes gripp?es courent plus de risques d?attraper le virus H5N1. Le soir, lorsque sa m?re va lui rendre visite, elle le trouve dans un service diff?rent de celui dans lequel il a ?t? admis. ?Mon c?ur a failli s?arr?ter de battre, je pensais qu?il ?tait arriv? un malheur ? mon fils. Mais le m?decin est venu me rassurer. Il m?a expliqu? que Mohamad a ?t? mis en quarantaine sans pour autant m?en expliquer la raison?, poursuit la m?re qui dit avoir appris la nouvelle de sa maladie par les m?dias. Le lendemain, la m?re fut assaillie par une foule de gens et de journalistes. ?Les questions des journalistes et les rumeurs qui circulaient disant que mon fils ?tait mort me gla?aient de frayeur. ? chaque fois que je me rendais ? l?h?pital pour m?assurer qu?il allait bien, ? mon retour ? la maison, j?entendais dire qu?il ?tait mort?, raconte la m?re encore sous le choc tout en ajoutant que le jour o? il est sorti de l?h?pital, elle a sacrifi? un veau et distribu? sa viande ? tous les habitants du village pour remercier Dieu d?avoir sauv? son fils.
Soudain, Mohamad fait irruption dans le salon, avec son corps ch?tif et son sourire timide. Il vient tout juste de terminer son service de chauffeur de microbus. Un travail qu?il exerce depuis que la ferme de ses parents a ?t? d?truite. ?Je me porte ? merveille et ne suis plus aucun traitement?, lance-t-il. Mohamad nous relate l?histoire de l?inconnu qui souhaitait rencontrer celui qui a attrap? cette maladie rare. ?Ignorant que j??tais juste derri?re lui, il a recul? d?s que je me suis avanc? vers lui en mettant sa main sur son nez et sa bouche pour ?viter d??tre contamin?, puis il a fil? comme une fl?che!?. En fait, Mohamad n?a appris le nom de sa maladie que lorsque le ministre de la Sant? lui a rendu visite pour s?enqu?rir de sa sant?. ?C?est lui qui m?a dit que j??tais atteint du virus de la grippe aviaire. A ce moment, je m?en suis remis ? Dieu et me suis dit que si un malheur devait m?arriver, alors il arriverait car tel est mon destin?, poursuit-il. Tout le temps qu?a dur? son hospitalisation, Mohamad n?a fait que prier et lire le Coran. Il dit qu?il n?a pas eu peur de la mort et qu?il y avait d?j? ?chapp? ? l??ge de 10 ans apr?s avoir attrap? une forte fi?vre le laissant paralys? durant un mois.
10 % de chances de survie
Autre victime. Cha?maa Kha?ri habite le village de Minyet Kaline, dans le gouvernorat de Kafr Al-Cheikh (Delta). Elle est rest?e sous respiration artificielle pendant 11 jours. Ses chances de survie n??taient que de 10 %. Cette jeune fille de 18 ans s?occupait uniquement d?un ?levage d?oiseaux. ? Prise d?un malaise, je fus transport?e ? l?h?pital des maladies contagieuses ? Abbassiya, au Caire. On ne m?a pas dit de quoi je souffrais mais d?apr?s le regard et les pr?cautions que prenait le personnel m?dical, j?ai r?alis? que c??tait assez s?rieux. Je ne me suis rendu compte de la gravit? de la maladie que lorsque j?ai appris la nouvelle du d?c?s de la femme de 30 ans originaire du village de Nawa et qui poss?dait une basse-cour ?, explique Cha?maa. Trente-cinq jours d?hospitalisation et de lutte contre la mort, un v?ritable cauchemar pour cette jeune fille et son entourage qui ne s?attendait pas ? ce que cette maladie soit vaincue. Un jour, le p?re a demand? ? la m?re de l?accompagner pour rendre visite ? Cha?maa. La maman est rest?e p?trifi?e. ?Je pensais qu?il m?emmenait la voir pour la derni?re fois. Mais Dieu est mis?ricordieux, il n?a pas voulu me priver de ma fille?. Apr?s deux mois d?hospitalisation, Cha?maa a ?t? accueillie avec des youyous. Elle qui avait quitt? les siens sur une civi?re revenait chez elle en marchant.
De Kafr Al-Cheikh ? Tanta, et plus pr?cis?ment dans le bourg de Birma, Mohamad Ghobachi, un ?tudiant de 17 ans, a lui aussi attrap? la maladie alors qu?il essayait de soigner quelques-unes de ses poules contamin?es par la grippe aviaire. ?On perdait 1 000 volailles par jour. En trois jours, 6 000 ont p?ri. Le spectacle ?tait d?solant, mais j?ai fait tout mon possible pour les soigner en mettant dans ma bouche le m?dicament prescrit par le v?t?rinaire que je pla?ais dans le bec de mes poules?, explique-t-il. C?est ainsi que Ghobachi a ?t? contamin?. ?Si Dieu veut me donner longue vie, on peut m?me me jeter dans la mer, il ne m?arrivera rien?, nous dit-il. Lorsque les voisins ont appris la nouvelle de ma maladie et m?me par la suite lorsque je suis sorti de l?h?pital, ils n?osaient pas s?approcher de moi, comme si j??tais un l?preux. Il y en avait m?me qui changeaient de trottoir. Quant ? mes coll?gues, ils m?ont surnomm? Mohamad richa (plume) et m?me Mohamad influenza (grippe) depuis que j?ai vaincu la maladie.
En tout, 100 provinces et hameaux dans 12 gouvernorats d?Egypte ont ?t? contamin?s par la grippe aviaire. Et m?me si le danger est pass?, la prudence reste de mise car l??pizootie peut reprendre et la maladie retransmise aux habitants. S?il est ?tabli que le virus peut aussi se transmettre d?homme ? homme, comme cela a ?t? bri?vement ?voqu?, la proportion de survivants pourrait alors ?tre bien inf?rieure.
Source: http://hebdo.ahram.org.eg/arab/ahram...6/14/soci2.htm