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Mohamed Bouazizi: un h?ros trop parfait

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  • Mohamed Bouazizi: un h?ros trop parfait

    Publi? le 26 d?cembre 2011 ? 05h00 | Mis ? jour ? 10h03

    Mohamed Bouazizi: un h?ros trop parfait

    Jean-Simon Gagn?
    Le Soleil

    (Qu?bec) 17 d?cembre 2010. Un peu avant midi. Sur la grande place de Sidi Bouzid, une ville de 50 000 habitants au centre la Tunisie, un jeune marchand essaie d'attirer l'attention des passants. Un peu plus t?t, des policiers lui ont confisqu? sa balance, sous pr?texte qu'il n'avait pas les permis n?cessaires. Des t?moins ont vu le jeune homme s'engueuler avec eux. Mohamed Bouazizi exige de voir le maire, le gouverneur. N'importe qui pour obtenir justice. En vain.

    ? la fin, il s'asperge d'essence. Puis, il gratte une allumette. Ou peut-?tre est-ce un briquet? Submerg?s par l'horreur, les t?moins ne sauront plus...

    Horriblement br?l?, Mohamed Bouazizi est amen? ? l'h?pital. D?j?, son destin lui ?chappe. L'apr?s-midi m?me, ils sont 2000 qui hurlent leur col?re. La machine ? rumeurs s'emballe, aliment?e par les m?dias sociaux. Bouazizi aurait ?t? gifl? par une polici?re sadique. L'humiliation supr?me. On le pr?sente comme un dipl?m? universitaire, d?sesp?r? de n'avoir pu trouver un emploi ? la hauteur de ses r?ves. On lui pr?te des sentiments r?volutionnaires. On lui d?couvre m?me des talents de po?te...

    Pour calmer la col?re populaire, la dictature aux abois tente de r?cup?rer le drame. De montrer de la compassion. Le 28 d?cembre, le pr?sident Ben Ali rend visite ? Bouazizi, qui agonise ? l'h?pital. Puis le pr?sident re?oit la famille Bouazizi en audience. Quelques heures plus tard, les sbires de Ben Ali viennent arr?ter Fayda Hamdi, la polici?re soup?onn?e d'avoir gifl? l'infortun? marchand.

    La polici?re va passer plusieurs longs mois en prison. Et la chute de la dictature, le 14 janvier, n'y changera rien. Oubli?e de tous, ? bout de ressources, elle entreprendra une gr?ve de la faim pour compara?tre devant un juge. Elle ne sera finalement lib?r?e qu'en avril, sauv?e par l'absence de t?moins cr?dibles.

    La fabrication d'une l?gende

    En juin, la polici?re livre sa version des faits au quotidien fran?ais Lib?ration. ?La veille, j'avais d?j? demand? [? Bouazizi] de partir et il s'?tait ex?cut?, a-t-elle expliqu?. Mais ce matin-l?, il ne voulait rien entendre. Il ?tait tellement en col?re qu'il m'a cri? dessus et tordu le doigt. Il a aussi voulu arracher les ?paulettes de mon uniforme.? Mais elle jure qu'elle n'a pas gifl? le jeune homme.

    Contre toute attente, la version de la polici?re a ?t? confirm?e par plusieurs manifestants de la premi?re heure. Un responsable syndical a confi? au quotidien Lib?ration qu'il a tout invent?, dans les heures qui ont suivi le drame. ?On a dit qu'il ?tait dipl?m? ch?meur pour toucher le public, alors qu'il n'avait que le niveau [secondaire] et travaillait comme marchand, a-t-il expliqu?. Pour faire bouger ceux qui ne sont pas ?duqu?s, on a invent? la claque de Fayda Hamdi.?

    De l'avis g?n?ral, Mohamed Bouazizi n'?tait pas un gars tr?s politis?, m?me s'il participait ? des manifestations. On sait seulement que le jeune homme poussait une charrette de l?gumes pour subvenir aux besoins de ses fr?res et soeurs. La charrette ?tait lourde. Le salaire an?mique. Et il est probable que certains policiers confisquaient des marchandises, pour essayer de lui soutirer un peu d'argent.

    /.../

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