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H1N1 : "Le partage des antiviraux att?nuerait la pand?mie"
LE MONDE | 30.04.09 | 13h18 ? Mis ? jour le 30.04.09 | 18h46
Comment va ?voluer l'?pid?mie due ? la nouvelle souche virale de sous-type H1N1 ? Comme on tente de pr?voir l'?volution du climat avec des simulations num?riques, des chercheurs fran?ais, italiens et am?ricains ont d?velopp? un mod?le de propagation d'?pid?mie fond? notamment sur les transports a?riens, la structure de la population mondiale, les caract?ristiques biologiques du virus et les strat?gies de lutte mises en oeuvre par les autorit?s sanitaires.
Marc Barth?lemy, chercheur au Commissariat ? l'?nergie atomique (CEA), a particip? ? ces travaux de mod?lisation. Selon ce physicien statisticien, il y a deux grandes le?ons ? tirer de ces simulations. La premi?re est que c'est le transport a?rien qui dicte le rythme de la propagation de la maladie. La seconde est qu'une gestion concert?e et "altruiste" des stocks d'antiviraux pourrait r?duire consid?rablement l'impact d'une pand?mie - comme celle que redoutent actuellement les autorit?s sanitaires.
Comment ?valuer la pertinence d'un mod?le de simulation de propagation ?pid?mique ? l'?chelle mondiale ?
Dans le cas de celui que nous avons d?velopp?, nous avons voulu ?valuer les effets du transport a?rien mondial sur la propagation d'une ?pid?mie. Nous avons test? ce mod?le dans le cas du SRAS (Syndrome respiratoire aigu s?v?re, apparu en novembre 2002 en Chine et qui a, au total, touch? une trentaine de pays) et nous avons retrouv? le comportement de diffusion de la maladie, tel qu'on avait pu l'observer ? l'?poque. Il y avait bien s?r des incertitudes sur les conditions dans lesquelles elle est survenue, puisque les autorit?s chinoises avaient tard? ? d?clarer les premiers cas. Mais en faisant des hypoth?ses raisonnables et en supposant que l'?pid?mie ?tait partie d'Hongkong, le mod?le reproduit avec une faible marge d'erreurs le nombre de cas survenus dans chaque pays.
Le transport a?rien appara?t donc comme le facteur d?terminant de la diffusion d'une maladie infectieuse ? l'?chelle mondiale, conclusion qui s'applique notamment au virus H1N1.
Il faudrait donc restreindre le trafic a?rien pour ?viter la pand?mie ?
Non. Vu la complexit? du r?seau des interconnexions des quelque 3 000 plates-formes a?roportuaires dans le monde, de simples restrictions - ? moins d'une quasi-interruption - ne fonctionnent pas. Nous avons v?rifi? ? l'aide de notre mod?le que ces restrictions ne changeraient presque rien ? la diffusion de la maladie.
Eventuellement, une surveillance accrue des vols directs en provenance des zones touch?es peut s'av?rer utile. D'ailleurs, on peut observer aujourd'hui que presque tous les cas "import?s" du Mexique proviennent de vols directs...
Dans ce cas, quel levier actionner pour ralentir la propagation du H1N1 ou en r?duire les effets ?
Nous avons simul? la propagation d'une maladie de type grippal transmissible entre humains et avons test? deux strat?gies d'utilisation des stocks de m?dicaments antiviraux disponibles ? travers le monde. Dans la premi?re strat?gie, chaque pays utilise ses stocks ?go?stement en les r?servant ? sa propre population. Dans la seconde, les pays les plus riches envoient une petite part - de l'ordre de 10 % ? 20 % - de leurs r?serves aux premiers pays touch?s par l'?pid?mie. Dans nos simulations, cette gestion "altruiste" ou "collaborative" des stocks d'antiviraux r?duit l'impact de la pand?mie. Par rapport aux r?sultats donn?s par une gestion "?go?ste", le nombre de cas mondial peut ?tre divis? par 10 ? 1 000 selon le pays et la saison au cours de laquelle se d?clenche l'?pid?mie.
De plus, gr?ce ? ce mode de gestion, la survenue du pic ?pid?mique peut ?tre d?cal?e dans le temps d'au moins un an. Ce d?lai peut s'av?rer crucial car il permet de d?velopper et de produire un vaccin dans le cas des virus grippaux comme le H1N1. Agir le plus vite possible, ? la source, en y d?p?chant des m?dicaments antiviraux semble la priorit? absolue.
Quels autres param?tres jouent un r?le dans le d?veloppement de l'?pid?mie ?
Ce que nous appelons les "conditions initiales" comptent ?norm?ment. Celles-ci d?signent, entre autres, l'endroit o? se produit la mutation virale qui d?clenche l'?pid?mie et la p?riode de l'ann?e ? laquelle se produit cette mutation. Selon que le foyer initial se trouve dans l'h?misph?re Nord ou Sud, selon la saison, la propagation de l'?pid?mie sera tr?s diff?rente car les virus grippaux se transmettent moins facilement en ?t? qu'en hiver. De ce point de vue, la situation actuelle est plut?t favorable ? l'h?misph?re Nord, le plus peupl?, o? l'?t? va d?buter.
L'?pid?mie sera aussi diff?rente selon les param?tres ?pid?miologiques de la maladie (sa contagiosit?, sa p?riode d'incubation et la dur?e durant laquelle le sujet infect? est contagieux). Pour l'heure, m?me si les virus grippaux sont relativement bien connus, nous ignorons ces param?tres pour H1N1.
Quels avaient ?t? les r?sultats de la simulation de la propagation des virus de type grippe ?
Nous avions fait l'hypoth?se de la survenue en octobre ? Hano? (Vietnam) d'une mutation rendant le virus H5N1 transmissible entre humains. Comme le virus mut?, c'est-?-dire capable de se transmettre entre humains, n'?tait qu'hypoth?tique, nous avions fait notamment varier sa contagiosit? - d?finie comme le nombre moyen de personnes infect?es par un sujet contamin? - entre les valeurs 1,1 et 2,3 typiques des virus grippaux. Sans utilisation d'antiviraux, et avec une contagiosit? du virus sup?rieure ? 1,5, pr?s de 50 % de la population mondiale seraient touch?s. Ce nombre est fortement diminu? dans toutes les r?gions du monde en utilisant les antiviraux de mani?re coop?rative.
Propos recueillis par St?phane Foucart
Article paru dans l'?dition du 02.05.09.
LE MONDE | 30.04.09 | 13h18 ? Mis ? jour le 30.04.09 | 18h46
Comment va ?voluer l'?pid?mie due ? la nouvelle souche virale de sous-type H1N1 ? Comme on tente de pr?voir l'?volution du climat avec des simulations num?riques, des chercheurs fran?ais, italiens et am?ricains ont d?velopp? un mod?le de propagation d'?pid?mie fond? notamment sur les transports a?riens, la structure de la population mondiale, les caract?ristiques biologiques du virus et les strat?gies de lutte mises en oeuvre par les autorit?s sanitaires.
Marc Barth?lemy, chercheur au Commissariat ? l'?nergie atomique (CEA), a particip? ? ces travaux de mod?lisation. Selon ce physicien statisticien, il y a deux grandes le?ons ? tirer de ces simulations. La premi?re est que c'est le transport a?rien qui dicte le rythme de la propagation de la maladie. La seconde est qu'une gestion concert?e et "altruiste" des stocks d'antiviraux pourrait r?duire consid?rablement l'impact d'une pand?mie - comme celle que redoutent actuellement les autorit?s sanitaires.
Comment ?valuer la pertinence d'un mod?le de simulation de propagation ?pid?mique ? l'?chelle mondiale ?
Dans le cas de celui que nous avons d?velopp?, nous avons voulu ?valuer les effets du transport a?rien mondial sur la propagation d'une ?pid?mie. Nous avons test? ce mod?le dans le cas du SRAS (Syndrome respiratoire aigu s?v?re, apparu en novembre 2002 en Chine et qui a, au total, touch? une trentaine de pays) et nous avons retrouv? le comportement de diffusion de la maladie, tel qu'on avait pu l'observer ? l'?poque. Il y avait bien s?r des incertitudes sur les conditions dans lesquelles elle est survenue, puisque les autorit?s chinoises avaient tard? ? d?clarer les premiers cas. Mais en faisant des hypoth?ses raisonnables et en supposant que l'?pid?mie ?tait partie d'Hongkong, le mod?le reproduit avec une faible marge d'erreurs le nombre de cas survenus dans chaque pays.
Le transport a?rien appara?t donc comme le facteur d?terminant de la diffusion d'une maladie infectieuse ? l'?chelle mondiale, conclusion qui s'applique notamment au virus H1N1.
Il faudrait donc restreindre le trafic a?rien pour ?viter la pand?mie ?
Non. Vu la complexit? du r?seau des interconnexions des quelque 3 000 plates-formes a?roportuaires dans le monde, de simples restrictions - ? moins d'une quasi-interruption - ne fonctionnent pas. Nous avons v?rifi? ? l'aide de notre mod?le que ces restrictions ne changeraient presque rien ? la diffusion de la maladie.
Eventuellement, une surveillance accrue des vols directs en provenance des zones touch?es peut s'av?rer utile. D'ailleurs, on peut observer aujourd'hui que presque tous les cas "import?s" du Mexique proviennent de vols directs...
Dans ce cas, quel levier actionner pour ralentir la propagation du H1N1 ou en r?duire les effets ?
Nous avons simul? la propagation d'une maladie de type grippal transmissible entre humains et avons test? deux strat?gies d'utilisation des stocks de m?dicaments antiviraux disponibles ? travers le monde. Dans la premi?re strat?gie, chaque pays utilise ses stocks ?go?stement en les r?servant ? sa propre population. Dans la seconde, les pays les plus riches envoient une petite part - de l'ordre de 10 % ? 20 % - de leurs r?serves aux premiers pays touch?s par l'?pid?mie. Dans nos simulations, cette gestion "altruiste" ou "collaborative" des stocks d'antiviraux r?duit l'impact de la pand?mie. Par rapport aux r?sultats donn?s par une gestion "?go?ste", le nombre de cas mondial peut ?tre divis? par 10 ? 1 000 selon le pays et la saison au cours de laquelle se d?clenche l'?pid?mie.
De plus, gr?ce ? ce mode de gestion, la survenue du pic ?pid?mique peut ?tre d?cal?e dans le temps d'au moins un an. Ce d?lai peut s'av?rer crucial car il permet de d?velopper et de produire un vaccin dans le cas des virus grippaux comme le H1N1. Agir le plus vite possible, ? la source, en y d?p?chant des m?dicaments antiviraux semble la priorit? absolue.
Quels autres param?tres jouent un r?le dans le d?veloppement de l'?pid?mie ?
Ce que nous appelons les "conditions initiales" comptent ?norm?ment. Celles-ci d?signent, entre autres, l'endroit o? se produit la mutation virale qui d?clenche l'?pid?mie et la p?riode de l'ann?e ? laquelle se produit cette mutation. Selon que le foyer initial se trouve dans l'h?misph?re Nord ou Sud, selon la saison, la propagation de l'?pid?mie sera tr?s diff?rente car les virus grippaux se transmettent moins facilement en ?t? qu'en hiver. De ce point de vue, la situation actuelle est plut?t favorable ? l'h?misph?re Nord, le plus peupl?, o? l'?t? va d?buter.
L'?pid?mie sera aussi diff?rente selon les param?tres ?pid?miologiques de la maladie (sa contagiosit?, sa p?riode d'incubation et la dur?e durant laquelle le sujet infect? est contagieux). Pour l'heure, m?me si les virus grippaux sont relativement bien connus, nous ignorons ces param?tres pour H1N1.
Quels avaient ?t? les r?sultats de la simulation de la propagation des virus de type grippe ?
Nous avions fait l'hypoth?se de la survenue en octobre ? Hano? (Vietnam) d'une mutation rendant le virus H5N1 transmissible entre humains. Comme le virus mut?, c'est-?-dire capable de se transmettre entre humains, n'?tait qu'hypoth?tique, nous avions fait notamment varier sa contagiosit? - d?finie comme le nombre moyen de personnes infect?es par un sujet contamin? - entre les valeurs 1,1 et 2,3 typiques des virus grippaux. Sans utilisation d'antiviraux, et avec une contagiosit? du virus sup?rieure ? 1,5, pr?s de 50 % de la population mondiale seraient touch?s. Ce nombre est fortement diminu? dans toutes les r?gions du monde en utilisant les antiviraux de mani?re coop?rative.
Propos recueillis par St?phane Foucart
Article paru dans l'?dition du 02.05.09.
