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L?ann?e Darwin bat son plein
L??volution, une th?orie qui int?resse aussi la m?decine
Comm?morant les 200 ans de la naissance de Charles Darwin, le 12 f?vrier 1809, et le 150<sup>e</sup> anniversaire de la publication de ? l?Origine des esp?ces ?, l?ann?e Darwin est l?occasion de nombreuses manifestations et parutions. Notamment en Angleterre et en France. Au milieu de ce foisonnement, ? le Quotidien ? a choisi de mettre l?accent sur la m?decine ?volutive, un concept r?cent qui s?int?resse aux causes ?volutives des maladies.
LA TH?ORIE de l??volution n?en finit pas de faire des petits. Le terme ? Darwinian Medicine ?, traduit en fran?ais par ? m?decine ?volutive ?, appara?t pour la premi?re fois en 1991 dans un article du Dr Randolph Nesse, psychiatre ? l?universit? de Michigan, et George Williams, biologiste de l??volution ? l?universit? de New York. Mais c?est la sortie de leur livre, ? Why we get sick : the new science of darwinian medicine ? (? Pourquoi nous tombons malades : la nouvelle science de la m?decine ?volutive ?), en 1995, qui fait conna?tre cette nouvelle approche des causes ?volutives des maladies et des sympt?mes*.
En2006, dans la revue ? Science ?, Nesse r?cidive, avec un appel sign? par deux autres scientifiques pour la reconnaissance de la biologie ?volutive parmi les sciences m?dicales. ? Notre organisme est le r?sultat de compromis ?volutif. Le but de la m?decine est d?assurer notre bien-?tre et notre long?vit?. Tandis que c?est la valeur s?lective qui a ?t? optimis?e pour assurer survie et reproduction ?, explique Michel Raymond, chercheur en biologie ?volutive ? l?institut des sciences de l??volution de Montpellier (CNRS-Universit? de Montpellier), l?un des rares Fran?ais ? s?int?resser ? ce sujet. Il aborde la m?decine ?volutive dans son livre ? Cro-Magnon toi-m?me ?** et donne de nombreux exemples. Ainsi, la toux, la fi?vre et la diarrh?e sont les r?ponses de la s?lection naturelle ? l?infection. Savoir quand les stopper n?cessite de comprendre comment la s?lection a mis en place les syst?mes qui r?gulent les d?fenses de l?organisme. Mais le savoir m?dical n?est pas encore assez fin pour prescrire le maintien ou la suppression de la fi?vre selon le type de pathog?ne.
R?ponse adaptative.
Autre exemple, la baisse du fer plasmatique chez la femme enceinte, qui est naturellement immunod?prim?e, est interpr?t?e comme une d?ficience et non comme une r?ponse adaptative de protection contre les agents pathog?nes. De m?me, la raret? du fer dans le lait maternel serait une adaptation contre les risques d?infections intestinales des nourrissons et les lactoferrines sont fortement assimilables. C?est lorsqu?on passe ? des aliments ext?rieurs et au lait de vache que le b?b? risque de se trouver an?mie.
Plus g?n?ralement, les diff?rences g?n?tiques (et pas seulement le polymorphisme) sont telles entre groupes humains que les pratiques m?dicamenteuses doivent parfois ?tre ethniquement adapt?es. Le traitement de la polyarthrite rhumato?de ne doit pas ?tre le m?me pour un Occidental que pour un Chinois, du fait de diff?rences au niveau du locus TYMS. Diminuer la consommation de graisses satur?es et augmenter les insatur?es en cas de cholest?rol n?est pas toujours un bon conseil : notamment chez les femmes pr?sentant un variant d?une aloprot?ine E (le ph?notype Apo3/2).
Notons aussi que si une Anglaise et une Indienne en d?but de grossesse ?changent leur place, l?Anglaise va manquer de protection contre les UV. Le folate circulant dans son sang va ?tre d?grad? par la lumi?re ; or, le f?tus en a besoin. L?Indienne sera au contraire surprot?g?e et la vitamine D3 produite par photolyse va manquer ? l?embryon. Il va falloir suppl?menter l?une en folate et l?autre en vitamine D3 alors qu?elles n?en auraient pas eu besoin dans leurs environnements respectifs. De m?me, l?introduction de l??levage et des vaches laiti?res a s?lectionn? il y a 8 000 ? 9 000 ans la pr?sence de lactase active ? l??ge adulte chez les ?leveurs du Nord de l?Europe (Su?de) ou de l?Afrique de l?est (Tutsis) lorsqu?ils se sont mis ? consommer beaucoup de lait frais.
Michel Raymond est convaincu que de plus en plus de probl?mes ?volutifs vont se poser au m?decin du fait des migrations et des changements alimentaires, dont on mesure d?j? les cons?quences : l?augmentation de la myopie est ?troitement corr?l?e ? l?augmentation de la consommation de sucres rapides. Que dire de l?accroissement des allergies, que l?on peut attribuer ? un manque de contact avec les microbes li? ? la st?rilisation de la vie moderne ? Le m?canisme de d?fense sous-utilis? se d?clencherait alors contre des signaux inappropri?s comme un aliment ou un pollen. L?hypoth?se parasitaire a sugg?r? un traitement contre la maladie de Crohn par ingestion de 2 500 ?ufs d?un vers intestinal du cochon toutes les trois semaines pendant six mois. Objectif : recr?er un environnement favorable au plein fonctionnement du syst?me immunitaire. Ce qui s?est r?v?l? efficace.? Gageons que les prescriptions contenant des vers intestinaux ou d?autres extraits de parasites vont augmenter dans le futur ?, n?h?site pas ? conclure Michel Raymond.
? MARIE-FRAN?OISE DE PANGE
* www.evolutionandmedicine.org.
** ? Cro-Magon toi-m?me. Petit guide darwinien de la vie quotidienne ?, Seuil, 17 euros.
Happy Birthday, Darwin
DE NOTRE ENVOY?E SP?CIALE ? LONDRES
G?TEAU de 200 bougies, ?mission de timbre, d?bats, conf?rences, livres, pi?ce de th??tre, expositions, etc. l?ann?e Darwin bat son plein en Angleterre, o? l?on s?appr?te ? c?l?brer le Darwin Day. ? Londres, il ne faut pas manquer la grande exposition ? Darwin Big Idea ?, organis?e par les mus?ums d?histoire naturelle britannique et am?ricain.
Vivants ou empaill?s, les animaux sont au c?ur du parcours, comme ils furent au c?ur des r?flexions de Darwin, qui collectionna d?s son jeune ?ge coquillages, scarab?es, ?ufs, min?raux et monnaies. ? travers ses documents et souvenirs personnels, on d?couvre - non sans ?motion - comment un jeune naturaliste b?n?vole, dot? d?un sens de l?observation remarquable allait r?volutionner notre regard sur le monde.
Il mettra des ann?es ? ?tudier la r?colte de son voyage sur le ? Beagle ? (il en rapporte 1 500 esp?ces), accumulant les preuves de ses intuitions ; et encore plus longtemps ? les publier, tant il avait conscience, lui que son p?re destinait ? devenir m?decin puis clergyman, de d?tenir un ? br?lot ?. Cent cinquante ans apr?s sa publication, les pol?miques d?clench?es par ? l?Origine des esp?ces ? ne sont toujours pas ?teintes (57 % des Am?ricains se disent cr?ationnistes). Un d?fil? de scientifiques explique en vid?o en quoi ? creationism is not scientific ?.
? M.-F. P.
Natural History Museum, de 10 heures ? 17 h 30 (derni?re admission), jusqu?au 19 avril. Entr?e 9 ? et 4,5 pour les enfants. www.nhm.ac.uk.
L??volution, une th?orie qui int?resse aussi la m?decine
Comm?morant les 200 ans de la naissance de Charles Darwin, le 12 f?vrier 1809, et le 150<sup>e</sup> anniversaire de la publication de ? l?Origine des esp?ces ?, l?ann?e Darwin est l?occasion de nombreuses manifestations et parutions. Notamment en Angleterre et en France. Au milieu de ce foisonnement, ? le Quotidien ? a choisi de mettre l?accent sur la m?decine ?volutive, un concept r?cent qui s?int?resse aux causes ?volutives des maladies.
LA TH?ORIE de l??volution n?en finit pas de faire des petits. Le terme ? Darwinian Medicine ?, traduit en fran?ais par ? m?decine ?volutive ?, appara?t pour la premi?re fois en 1991 dans un article du Dr Randolph Nesse, psychiatre ? l?universit? de Michigan, et George Williams, biologiste de l??volution ? l?universit? de New York. Mais c?est la sortie de leur livre, ? Why we get sick : the new science of darwinian medicine ? (? Pourquoi nous tombons malades : la nouvelle science de la m?decine ?volutive ?), en 1995, qui fait conna?tre cette nouvelle approche des causes ?volutives des maladies et des sympt?mes*.
En2006, dans la revue ? Science ?, Nesse r?cidive, avec un appel sign? par deux autres scientifiques pour la reconnaissance de la biologie ?volutive parmi les sciences m?dicales. ? Notre organisme est le r?sultat de compromis ?volutif. Le but de la m?decine est d?assurer notre bien-?tre et notre long?vit?. Tandis que c?est la valeur s?lective qui a ?t? optimis?e pour assurer survie et reproduction ?, explique Michel Raymond, chercheur en biologie ?volutive ? l?institut des sciences de l??volution de Montpellier (CNRS-Universit? de Montpellier), l?un des rares Fran?ais ? s?int?resser ? ce sujet. Il aborde la m?decine ?volutive dans son livre ? Cro-Magnon toi-m?me ?** et donne de nombreux exemples. Ainsi, la toux, la fi?vre et la diarrh?e sont les r?ponses de la s?lection naturelle ? l?infection. Savoir quand les stopper n?cessite de comprendre comment la s?lection a mis en place les syst?mes qui r?gulent les d?fenses de l?organisme. Mais le savoir m?dical n?est pas encore assez fin pour prescrire le maintien ou la suppression de la fi?vre selon le type de pathog?ne.
R?ponse adaptative.
Autre exemple, la baisse du fer plasmatique chez la femme enceinte, qui est naturellement immunod?prim?e, est interpr?t?e comme une d?ficience et non comme une r?ponse adaptative de protection contre les agents pathog?nes. De m?me, la raret? du fer dans le lait maternel serait une adaptation contre les risques d?infections intestinales des nourrissons et les lactoferrines sont fortement assimilables. C?est lorsqu?on passe ? des aliments ext?rieurs et au lait de vache que le b?b? risque de se trouver an?mie.
Plus g?n?ralement, les diff?rences g?n?tiques (et pas seulement le polymorphisme) sont telles entre groupes humains que les pratiques m?dicamenteuses doivent parfois ?tre ethniquement adapt?es. Le traitement de la polyarthrite rhumato?de ne doit pas ?tre le m?me pour un Occidental que pour un Chinois, du fait de diff?rences au niveau du locus TYMS. Diminuer la consommation de graisses satur?es et augmenter les insatur?es en cas de cholest?rol n?est pas toujours un bon conseil : notamment chez les femmes pr?sentant un variant d?une aloprot?ine E (le ph?notype Apo3/2).
Notons aussi que si une Anglaise et une Indienne en d?but de grossesse ?changent leur place, l?Anglaise va manquer de protection contre les UV. Le folate circulant dans son sang va ?tre d?grad? par la lumi?re ; or, le f?tus en a besoin. L?Indienne sera au contraire surprot?g?e et la vitamine D3 produite par photolyse va manquer ? l?embryon. Il va falloir suppl?menter l?une en folate et l?autre en vitamine D3 alors qu?elles n?en auraient pas eu besoin dans leurs environnements respectifs. De m?me, l?introduction de l??levage et des vaches laiti?res a s?lectionn? il y a 8 000 ? 9 000 ans la pr?sence de lactase active ? l??ge adulte chez les ?leveurs du Nord de l?Europe (Su?de) ou de l?Afrique de l?est (Tutsis) lorsqu?ils se sont mis ? consommer beaucoup de lait frais.
Michel Raymond est convaincu que de plus en plus de probl?mes ?volutifs vont se poser au m?decin du fait des migrations et des changements alimentaires, dont on mesure d?j? les cons?quences : l?augmentation de la myopie est ?troitement corr?l?e ? l?augmentation de la consommation de sucres rapides. Que dire de l?accroissement des allergies, que l?on peut attribuer ? un manque de contact avec les microbes li? ? la st?rilisation de la vie moderne ? Le m?canisme de d?fense sous-utilis? se d?clencherait alors contre des signaux inappropri?s comme un aliment ou un pollen. L?hypoth?se parasitaire a sugg?r? un traitement contre la maladie de Crohn par ingestion de 2 500 ?ufs d?un vers intestinal du cochon toutes les trois semaines pendant six mois. Objectif : recr?er un environnement favorable au plein fonctionnement du syst?me immunitaire. Ce qui s?est r?v?l? efficace.? Gageons que les prescriptions contenant des vers intestinaux ou d?autres extraits de parasites vont augmenter dans le futur ?, n?h?site pas ? conclure Michel Raymond.
? MARIE-FRAN?OISE DE PANGE
* www.evolutionandmedicine.org.
** ? Cro-Magon toi-m?me. Petit guide darwinien de la vie quotidienne ?, Seuil, 17 euros.
Happy Birthday, Darwin
DE NOTRE ENVOY?E SP?CIALE ? LONDRES
G?TEAU de 200 bougies, ?mission de timbre, d?bats, conf?rences, livres, pi?ce de th??tre, expositions, etc. l?ann?e Darwin bat son plein en Angleterre, o? l?on s?appr?te ? c?l?brer le Darwin Day. ? Londres, il ne faut pas manquer la grande exposition ? Darwin Big Idea ?, organis?e par les mus?ums d?histoire naturelle britannique et am?ricain.
Vivants ou empaill?s, les animaux sont au c?ur du parcours, comme ils furent au c?ur des r?flexions de Darwin, qui collectionna d?s son jeune ?ge coquillages, scarab?es, ?ufs, min?raux et monnaies. ? travers ses documents et souvenirs personnels, on d?couvre - non sans ?motion - comment un jeune naturaliste b?n?vole, dot? d?un sens de l?observation remarquable allait r?volutionner notre regard sur le monde.
Il mettra des ann?es ? ?tudier la r?colte de son voyage sur le ? Beagle ? (il en rapporte 1 500 esp?ces), accumulant les preuves de ses intuitions ; et encore plus longtemps ? les publier, tant il avait conscience, lui que son p?re destinait ? devenir m?decin puis clergyman, de d?tenir un ? br?lot ?. Cent cinquante ans apr?s sa publication, les pol?miques d?clench?es par ? l?Origine des esp?ces ? ne sont toujours pas ?teintes (57 % des Am?ricains se disent cr?ationnistes). Un d?fil? de scientifiques explique en vid?o en quoi ? creationism is not scientific ?.
? M.-F. P.
Natural History Museum, de 10 heures ? 17 h 30 (derni?re admission), jusqu?au 19 avril. Entr?e 9 ? et 4,5 pour les enfants. www.nhm.ac.uk.